« Une rupture de financement aura un impact direct sur la survie des personnes vivant avec le VIH », avertit dans un entretien avec ONU Info Susan Kasedde, la directrice en RDC de l’ONUSIDA, le programme onusien qui coordonne la lutte contre la pandémie de VIH/sida.

Une épidémie toujours en croissance

La RDC compte aujourd’hui environ 520.000 personnes vivant avec le VIH, dont 300.000 femmes et 50.000 enfants. L’épidémie continue de croître, comme l’indique le nombre de nouvelles infections presque deux fois plus élevé que celui des décès liés à la maladie.

Environ 21.000 nouvelles infections de VIH ont été recensées en 2023, dont 7.000 parmi les enfants, pour 11.000 décès dus au sida en RDC.

Le pays figure parmi ceux dont les mesures de prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant sont les plus faibles, comme le reflète le nombre important d’enfants congolais infectés.

A Kinshasa, en RDC, de jeunes congolaises participent à une séance de sensibilisation aux risques d’exposition au VIH organisée par le Réseau des Associations Congolaises des Jeunes (RACOJ).

Les femmes sont plus touchées

Selon Mme Kasedde, le fait que la majorité des adultes vivant avec le VIH soit des femmes est lié à la condition de la femme dans le pays.

Les taux inquiétants de violences sexuelles à l’encontre des femmes en RDC accroissent leur exposition au VIH et à d’autres maladies sexuelles transmissibles, mais, selon elle, « les violences ne sont qu’un facteur de surface lié à la condition de la femme congolaise en général ».

« On peut parler de la vulnérabilité financière et de la dépendance envers les autres pour les aspects de protection et d’approvisionnement, et donc la condition de la femme joue clairement sur la santé, la sécurité… et le VIH n’est qu’une fenêtre à travers laquelle nous pouvons voir l’impact de cela », explique la haute responsable onusienne.

L’effet protecteur de l’école

« Nous savons que l’accès à la scolarisation est vraiment différent pour une jeune fille ici en RDC que pour un jeune homme », souligne Susan Kasedde.

Lorsque les jeunes filles se retrouvent à travailler, ou à chercher de l’eau, au lieu d’aller à l’école elles risquent d’avoir des relations avec des partenaires plus âgés ou avec plusieurs partenaires. Leurs activités peuvent les exposer au VIH, explique-t-elle, ajoutant que le mariage précoce est un facteur supplémentaire, outre la déscolarisation.

« Pendant que les garçons, jour après jour, sont à l’école, en train d’apprendre… ils sont protégés par l’environnement scolaire, qui réduit le risque physique, le risque environnemental mais aussi le risque en termes de l’exposition aux opportunités », ajoute-t-elle. « Ces éléments exacerbent le risque que la jeune fille sera, à un certain moment, exposée au VIH beaucoup plus tôt peut être qu’un jeune homme ».

Le fonctionnement des laboratoires est une partie intégrale de la réponse au VIH en RDC et permet de suivre les patients pour établir les interventions indiquées et assurer une bonne santé.

Près de 90% des personnes vivant avec le VIH reçoivent un traitement

L’ONUSIDA et ses partenaires travaillent avec le gouvernement congolais pour mettre en œuvre une réponse nationale qui assure l’accès à des soins de qualité et à la prévention, mais aussi la mise en oeuvre de politiques permettant la pérennisation des approches efficaces en matière de lutte contre le VIH.

« Le pays a réussi à mettre sous traitement 440.000 personnes vivant avec le VIH, soit au moins 87% des personnes ayant besoin de traitement », signale Mme Kasedde, notant qu’il reste encore beaucoup à faire pour garantir un accès au traitement à 100% des personnes vivant avec le VIH.

L’approvisionnement est un volet essentiel de la réponse au VIH en RDC. L’entrepôt de l’Association Régionale d’Approvisionnement en Médicaments Essentiels (ASRAMES) est certifié et approvisionné par le gouvernement de la RDC, le gouvernement américain et le Fonds mondial.

La moitié des traitements financée par les Etats-Unis

La réponse au VIH en République démocratique du Congo est financée à 80% par deux grands bailleurs de fonds, le programme de la présidence des Etats-Unis PEPFAR [President’s Emergency Program for AIDS Remedy] et le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.

La contribution attendue du PEPFAR pour l’année fiscale 2025 s’élève à 105 millions de dollars et vise à traiter la moitié des personnes vivant avec le VIH en RDC, soient 209.000 personnes.

« Cela veut dire que nous avons actuellement 440.000 personnes vivant avec le VIH qui sont sous traitement. Grâce à ce traitement, elles sont en vie ».

Comme beaucoup d’agences d’aide et de développement à travers le globe, l’ONUSIDA a reçu l’annonce du gel des financements américains au mois de janvier.

Mais l’aide est-elle véritablement suspendue ?

« Ce n’est pas clair », observe Mme Kasedde. « Nous avons reçu des informations annonçant la continuation des activités financées par PEPFAR mais pas toutes les activités, ‘certaines activités’. Et il est toujours question de savoir lesquelles ».

« Et puis le traitement ne peut pas fonctionner sans capacité opérationnelle, le traitement ne peut pas être assuré s’il n’y a pas une chaîne d’approvisionnement qui fonctionne bien », souligne-t-elle, rappelant que les composantes de la réponse au VIH en RDC sont largement interdépendantes et se renforcent les unes les autres.

Un distributeur communautaire polyvalent délivre son traitement à un patient au Poste de distribution des ARV pour patients stable (PODI) de la commune de Lingwala à Kinshasa, RDC.

Continuité des traitements : « la priorité des priorités »

Selon Mme Kasedde, une rupture de financement aurait un impact direct sur la survie des personnes vivant avec le VIH.

L’ONUSIDA et ses partenaires s’acharnent à revoir les données, patient par patient, pour s’assurer du suivi des patients où qu’ils se trouvent.

Pour illustrer la gravité de l’impact d’une éventuelle rupture de financement, la Directrice d’ONUSIDA en RDC cite en exemple l’impact des récentes ruptures de traitements provoquées par la crise sécuritaire qui sévit depuis fin janvier à Goma, dans l’est du pays, désormais sous le contrôle du groupe armé M23, soutenu par le Rwanda.

Selon les informations récoltées par les acteurs communautaires avec lesquels l’ONUSIDA travaille depuis des années, elle note qu’après seulement quatre semaines de ruptures « environ 40% des personnes vivant avec le VIH qui bénéficient régulièrement du soutien de l’organisation, à domicile et autres, ne disposent plus de suffisamment de médicaments pour assurer la continuité de leur traitement ».

« Et 8% sont décédées », martèle-t-elle.

Cela souligne la fragilité de la santé et la rapidité avec laquelle elle se dégrade lorsqu’il y a rupture d’accès aux services, aux médicaments, à l’appui psychosocial, et à l’accompagnement communautaire.

Quel sort attend les 209.000 patients atteints du VIH qui dépendent du PEPFAR pour leur traitement ?

Selon la responsable de l’ONUSIDA en RDC, si le gel continue dans la durée « nous allons voir très rapidement des ruptures d’accès aux médicaments, puis très rapidement, des décès ».

« Nous risquons de perdre énormément de Congolais et de Congolaises à cause de cette crise financière et de ces décisions… potentiellement des milliers ».

Source of original article: United Nations (news.un.org). Photo credit: UN. The content of this article does not necessarily reflect the views or opinion of Global Diaspora News (www.globaldiasporanews.com).

To submit your press release: (https://www.globaldiasporanews.com/pr).

To advertise on Global Diaspora News: (www.globaldiasporanews.com/ads).

Sign up to Global Diaspora News newsletter (https://www.globaldiasporanews.com/newsletter/) to start receiving updates and opportunities directly in your email inbox for free.