La guerre civile, qui oppose depuis bientôt deux ans les paramilitaires des forces de soutien rapide (FSR) aux forces armées soudanaises (FAS) du général Abdel Fattah al-Burhane, a entraîné la détention arbitraire de dizaines de milliers de personnes, dont des femmes et des enfants, souvent privées de tout contact avec leur famille et retenus dans des installations sordides et surpeuplées.
« Les conditions inhumaines des centres de détention, en violation des normes internationales, sont profondément troublantes », a déclaré dans un communiqué de presse le chef des droits humains de l’ONU, Volker Türk, à l’occasion de la publication d’une nouvelle étude sur les conditions de détention dans l’État de Khartoum, la capitale soudanaise.
Discriminations ethniques
Publié par le Bureau des droits de l’homme des Nations Unies, le rapport, qui couvre la période allant du début du conflit, le 15 avril 2023, à juin 2024, est basé sur une trentaine d’entretiens avec des anciens détenus, des témoins et des membres de leurs familles.
Le chef des droits de l’homme de l’ONU, Volker Türk.
Les anciens détenus disent avoir subi des tortures et mauvais traitements éprouvants dans les centres de détention, y compris des coups violents et fréquents. Ils racontent avoir vu de nombreux détenus mourir en détention faute de soins médicaux, tant dans les centres de détention des FSR que dans ceux des FAS.
Le rapport fait état de l’utilisation d’enfants de 14 ans comme gardiens par les forces de sécurité, notamment dans la prison de Soba, ainsi que de cas de détention d’enfants âgés de 13 ans, aux côtés d’adultes.
Des violences sexuelles et l’exploitation de femmes détenues ont également été signalées dans deux lieux de détention contrôlés par les paramilitaires.
En outre, dans les lieux de détention contrôlés par les deux groupes, les anciens détenus décrivent des traitements discriminatoires fondés sur leur appartenance ethnique et leur affiliation supposée à la partie opposée.
Dans les installations des FSR, les personnes appartenant à des tribus africaines auraient tout particulièrement été ciblés fait l’objet de tortures et de mauvais traitements.
Les personnes originaires du Darfour et du Kordofan, y compris celles issues de tribus arabes, auraient été détenues dans les locaux des FAS en raison de leur appartenance ethnique et de leur affiliation supposée au FSR.
Disparitions forcées
Le manque d’informations sur le sort des détenus soulève de sérieuses inquiétudes quant à leur disparition forcée.
Dans un cas particulièrement poignant, une famille a demandé à plusieurs reprises des nouvelles d’un parent détenu par le personnel des services de renseignement des FSR. Chaque fois, la réponse des FSR a été la même : « Ne posez pas de questions à son sujet ».
Des mois plus tard, la famille a appris que le parent était décédé.
« Ces pratiques augmentent les risques de violation des normes et standards internationaux en matière de droits de l’homme et portent atteinte aux droits de la défense et à l’État de droit », a déploré M. Türk.
Bien que le rapport se concentre sur les pratiques dans les centres de détention de l’État de Khartoum, le Bureau des droits de l’homme des Nations Unies a documenté des schémas similaires dans d’autres parties du Soudan, y compris dans l’État d’Al Jazirah et dans la région du Darfour.
Des réfugiés soudanais arrivent à la ville frontalière d’Adre, au Tchad.
Tentatives d’établissement d’une autorité parallèle
Par ailleurs, le Conseil de sécurité a exprimé sa vive préoccupation face à la signature d’une charte visant à établir une autorité gouvernementale parallèle au Soudan.
Dans une déclaration publiée mercredi soir, les membres du Conseil ont souligné que de telles actions risquaient d’exacerber le conflit, fragmenter le pays et aggraver sa situation humanitaire « déjà désastreuse ».
Le Conseil a réaffirmé son attachement à l’unité et l’intégrité territoriale du Soudan et a souligné que toute mesure unilatérale portant atteinte à ces principes menaçait la stabilité du pays et de la région dans son ensemble.
Le Conseil a appelé les parties au conflit à négocier une cessation immédiate des hostilités et à engager, « de bonne foi », un dialogue politique et des efforts diplomatiques en vue d’un cessez-le-feu durable.
Tout en saluant l’appel de l’Union africaine (UA) et du Secrétaire général de l’ONU à déclarer d’urgence un cessez-le-feu pendant le mois de Ramadan, le Conseil a réitéré son appel au respect des engagements énoncés dans la Déclaration de Djeddah, signée il y a bientôt deux ans en Arabie saoudite, dans laquelle les parties belligérantes se sont engagées à protéger les civils et garantir un accès humanitaire sans entrave.
Le Conseil a souligné l’importance d’un dialogue national « véritable, inclusif et transparent » pour parvenir à un gouvernement national « libre, juste et démocratiquement élu », à l’issue d’une période de transition dirigée par des autorités civiles.
Il a également exhorté les États membres à s’abstenir de toute ingérence extérieure susceptible d’envenimer le conflit et l’instabilité au Soudan et à soutenir les efforts en faveur d’une paix durable dans le pays.
Détérioration rapide au Darfour du Nord
La branche humanitaire de l’ONU note par ailleurs que la situation se dégrade dans le camp de déplacés de Zamzam, dans l’État du Darfour du Nord, frappé depuis plusieurs mois par la famine.
Selon la presse, les paramilitaires des FSR, qui mènent une offensive contre l’armée dans la région depuis plusieurs semaines, ont pris le contrôle de la quasi-totalité de la partie occidentale du Darfour et assiégé El-Fasher, la capitale du Darfour du Nord, qui demeure sous le contrôle des FAS et de ses milices alliées.
L’accès humanitaire au camp de Zamzam est quasiment « impossible, au moment même où les gens ont le plus besoin d’aide », a alerté jeudi la Coordinatrice humanitaire des Nations Unies pour le Soudan, Clémentine Nkweta-Salami, sur les réseaux sociaux.
« Les civils continuent de payer le prix », a-t-elle déploré, relevant que les agences humanitaires ont besoin d’un accès « sans entrave pour apporter une aide vitale » aux populations.
Des services humanitaires à « bout de souffle »
La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, déraciné plus de 12 millions personnes, dont plus de la moitié sont des enfants, coupé des millions de personnes d’un accès aux services essentiels.
Dans ce contexte, Mme Nkweta-Salami a indiqué que « les services humanitaires sont à bout de souffle », alors que l’eau se fait rare et que les fournitures médicales et nutritionnelles s’épuisent.
« Les travailleurs humanitaires font tout ce qu’ils peuvent, mais les besoins humanitaires dépassent de loin les ressources disponibles », a-t-elle insisté. « Une aide urgente est nécessaire ».
Des familles du camp de Zamzam.
Aide suspendue dans le camp de Zamzam
Ces derniers développements surviennent une semaine après la décision du Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies de suspendre ses opérations dans le camp de déplacés Zamzam.
Le PAM a justifié, mercredi 26 février, son retrait en raison des « combats intenses » qui se déroulent dans la zone, deux jours après l’annonce d’une décision identique par l’ONG française Médecins sans frontières (MSF).
À El Fasher, l’intensification des combats a pris au piège des centaines de milliers de civils dans des tirs croisés, exacerbant une situation humanitaire déjà désastreuse.
Avec l’escalade des affrontements dans de nombreuses régions du Soudan, notamment au Darfour Nord et à Khartoum, des milliers de civils sont à nouveau en fuite.
La crise alimentaire la plus grave au monde
Parallèlement, le Soudan est confronté à la crise alimentaire la plus grave au monde.
Près de 25 millions de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire aiguë, soit plus de la moitié de la population, ce qui représente « le niveau de faim le plus élevé de l’histoire du pays ».
Un Soudanais sur deux a du mal à mettre de la nourriture sur la table, et les gens succombent déjà à la faim.
Le Soudan est également la seule nation au monde à être frappée par la famine, qui a été confirmée dans cinq régions au mois de décembre 2024, à savoir les camps de Zamzam, d’Al Salam et d’Abu Shouk, tous situés au Darfour du Nord, et les Monts Nouba, dans le sud du pays.
Cinq autres zones sont susceptibles de connaître des conditions de famine d’ici mai 2025, selon les projections du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC).
Source of original article: United Nations (news.un.org). Photo credit: UN. The content of this article does not necessarily reflect the views or opinion of Global Diaspora News (www.globaldiasporanews.com).
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